📍 🇫🇷 En panne à Dijon
Difficile de déchiffrer ce que l'écrivain américain Henry Miller (1891-1980) pensait vraiment de Dijon.
Était-ce vraiment l'enfer du brouillard et des gloires ducales décrépites que dépeint son célèbre roman « Tropique du Cancer » ? Était-ce la décennie elle-même (les années 1930..), la marche vers la Seconde Guerre mondiale ? Ses lettres à l'amante Anaïs Nin montrent surtout un artiste inconnu de 41 ans à bout de souffle, contraint d'accepter un emploi de précepteur d'anglais en février 1932 pour survivre. Trois semaines sans machine à écrire l'ont progressivement rendu fou et lui ont donné le concept du livre déjà mentionné qui s'est vendu à des millions ("Tropic"). A savoir l'autofiction d'un homme désespéré sur le chemin de sa vocation d'écrivain.
"Ce n'est pas seulement l'hiver ici mais la mort, la misère, surtout le brouillard", confie-t-il à Nin, affinant au passage son style à venir... "seulement une allée d'ossements morts, de figures tordues et rampantes enfouies dans des linceuls ; effigies ou gros petits monstres devant l'église Saint-Michel. Dans chaque crevasse du vieux front noueux, le chant creux du vent nocturne, et sur les décombres de dentelle des vêtements froids et raides, une boue nuageuse de brouillard et de givre ressemblant à de l'absinthe."
Pas très encourageant. Mais c'est là que résidait l'inspiration qu'il recherchait.
____ Sources ____
>> Henry Miller, "Tropique du Cancer", 1934
>> Miller & Nin, « Lettres d'Anaïs Nin & Henry Miller, 1932-1953 », 1989